Conférence de presse (7) : Le dogme «se développe avec le temps, toujours en progressant»


« Le dogme, la morale, sont toujours sur un chemin de développement, mais un développement dans le même sens ». Sur une question de morale conjugale, le pape François a expliqué que le dogme « se développe avec le temps », « se dilate et se consolide et devient plus ferme, mais toujours en progressant ».


Au cours de la conférence de presse pendant le vol de retour du voyage apostolique au Canada (24 au 30 juillet 2022), vendredi 29 juillet 2022, le pape François a répondu à la question de Claire Giangravè, de l’agence de presse américaine Religion News Service, sur la possibilité d’un « développement » dans la position de l’Eglise au sujet des contraceptifs.


« Le développement théologique doit être ouvert » et « le Magistère doit aider à comprendre les limites ». Se référant aux actes d’un récent congrès sur des questions matrimoniales, le pape a salué le travail des théologiens qui « ont essayé d’avancer dans la doctrine, mais dans un sens ecclésial, pas en-dehors ». Ensuite, a-t-il répété, le « Magistère » se prononcera.


« Une Eglise qui ne développe pas sa pensée dans un sens ecclésial est une Eglise qui recule », a poursuivi le pape, car elle est privée de ses racines. « La tradition est précisément la racine de l’inspiration pour avancer dans l’Eglise », elle est « toujours ouverte, comme les racines de l’arbre et l’arbre grandit ainsi ».


 


Voici la question de Claire Giangravè (Religion News Service), et la réponse du pape :


 Beaucoup de catholiques, mais aussi de nombreux théologiens, croient qu’un développement est nécessaire dans la doctrine de l’Eglise sur les produits contraceptifs. Il semblerait que votre prédécesseur, Jean-Paul Ier, pensait aussi qu’il était peut-être nécessaire de reconsidérer l’interdiction totale. Qu’en pensez-vous, c’est-à-dire : êtes-vous ouvert, en somme, à une réévaluation dans ce sens ? Ou existe-t-il une possibilité pour un couple d’envisager des contraceptifs ?


J’ai compris, c’est quelque chose de très ponctuel. Sachez que le dogme, la morale, sont toujours sur un chemin de développement, mais un développement dans le même sens. Pour l’exprimer clairement, je crois l’avoir dit à d’autres occasions ici, pour le développement d’une question morale, un développement théologique pourrions-nous dire, ou dogmatique, il y a une règle qui est très claire et éclairante : c’est ce qu’a fait Vincent de Lérins, un Français, au Ve siècle.


Il dit que, pour avancer, pour se développer, la véritable doctrine ne doit pas être tranquille, elle se développe ut annis consolidetur, dilatetur tempore, sublimetur aetate. Cela signifie qu’elle se développe avec le temps, elle se dilate et se consolide et devient plus ferme, mais toujours en progressant. C’est pour cette raison que le devoir des théologiens est la recherche, la réflexion théologique. On ne peut faire de théologie avec un « non » devant soi. Ensuite, c’est le Magistère qui dira : « Non, tu es allé trop loin, reviens ». Mais le développement théologique doit être ouvert, les théologiens sont là pour cela. Et le Magistère doit aider à comprendre les limites.


Sur le problème des contraceptifs, je sais qu’une publication est sortie à ce sujet et sur d’autres questions matrimoniales. Ce sont les actes d’un congrès et, dans le congrès, il y a les « présentations », ensuite ils discutent entre eux et ils font des propositions. Il faut que nous soyons clairs : ceux qui ont participé à ce congrès ont fait leur devoir, parce qu’ils ont essayé d’avancer dans la doctrine, mais dans un sens ecclésial, pas en-dehors, comme je l’ai dit à propos de cette règle de Vincent de Lérins. Ensuite, le Magistère dira : « Oui, c’est bien » – « Non, cela ne va pas ».


Mais beaucoup de choses sont remises en question. Pensez par exemple aux armes atomiques : aujourd’hui, j’ai déclaré officiellement que l’usage et la possession des armes atomiques est immorale. Pensez à la peine de mort : avant, la peine de mort, oui… Maintenant, je peux dire que nous ne sommes pas loin de l’immoralité, parce que la conscience morale s’est bien développée…


Pour être clair : lorsque le dogme ou la morale se développe, c’est bien, mais dans cette direction, avec les trois règles de Vincent de Lérins. Je crois que c’est très clair : une Eglise qui ne développe pas sa pensée dans un sens ecclésial est une Eglise qui recule. Et c’est le problème d’aujourd’hui, de tous ceux qui se disent « traditionnels ». Non, ils ne sont pas traditionnels, ils sont « arriéristes », ils reculent, sans racines. Cela s’est toujours passé ainsi, au siècle dernier, cela s’est passé ainsi. Et « l’arriérisme » est un péché, parce qu’on n’avance pas avec l’Eglise. En revanche, la tradition – comme le disait quelqu’un, je crois l’avoir dit dans l’un de mes discours – , la tradition est la foi vivante des morts. Au contraire, pour ces « arriéristes » qui se disent traditionnalistes, c’est la foi morte des vivants. La tradition est précisément la racine de l’inspiration pour avancer dans l’Eglise. Et c’est toujours vertical. « L’arriérisme », c’est reculer, c’est toujours fermé. Il est important de bien comprendre le rôle de la tradition, qui est toujours ouverte, comme les racines de l’arbre et l’arbre grandit ainsi… Un musicien avait une très belle phrase, Gustav Mahler disait : la tradition en ce sens est la garantie de l’avenir, c’est la garantie, ce n’est pas une pièce de musée. Si tu conçois la tradition fermée, ce n’est pas la tradition chrétienne. C’est toujours la sève des racines qui te pousse en avant, en avant, en avant… C’est pourquoi, pour ta question, il faut réfléchir et faire avancer la foi et la morale, et tant qu’elle va dans la direction des racines, de la sève, tout va bien. Avec ces trois règles de Vincent de Lérins, que j’ai mentionnées.


 


© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat


 


 


 


 


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